Par: Rachid RAHA
Ce qui vient de se passer en Tunisie, -et ce qui est en train de se dérouler en Egypte-, nous interpelle afin de savoir si ces révolutions populaires pourraient avoir un effet de contagion au sein des pays de Tamazgha ? Cette question est dans toutes les lèvres et dans tous les esprits !
Sans doute, qu’en tout légitimité et objectivité on peut penser que la contagion est inéluctable, quoi qu’en disent les « intellectuels organiques penseurs domestiques » de nos pays, vu l’extraordinaire succès de la révolution tunisienne et de la génération des jeunes de « facebook », qui ont réussi à renverser l’une des plus dures dictatures d’Afrique du Nord.
Les dictatures et les régimes des pays nord-africains ont toujours partagé la même politique, celle de « diviser pour régner ». Ainsi les agents des différents ministères chargés de l’Intérieur n’ont jamais pensé être au service de leurs concitoyens, afin d’améliorer leurs conditions de vies. Leur seul et unique souci étant d’exclure la majorité des populations qui se retrouvent contraintes de vivre en marge de la société, comme c’est le cas pour les citoyens amazighophones des régions périphériques, afin que les intérêts d’une petite minorité aux commandes de leurs respectifs pays soient sauvegardés.
Il convient de rappeler le fameux discours du président américain Barak Obama à Accra, le 11 juillet 2009/2959, qui affirmait que l’avenir de l’Afrique appartenait aux africains, (reprenant ainsi une citation du grand roi amazigh Massinissa, il y a de cela 22 siècles), et que le changement ne pourrait surgir qu’au sein de la jeunesse. Obama anticipait ainsi sur ce qui allait survenir sur le continent africain, même si le président américain omettait de considérer nos pays nord africains en tant que pays africains !!! (Voir notre lettre ouverte au président Obama sur: http://www.rachidraha.com/Obama.html
Ce discours, publié intégralement sur les colonnes de la revue « Jeune Afrique » et du journal « Le Monde Amazigh », du mois septembre de 2009/2959, a commencé à avoir sa première répercussion au sein du pays qui a donné son nom à tout le continent, la Tunisie, ancienne Africa à l’époque phénicienne, et dont le nom dérive d’une tribu amazigh autochtones, les Afri (Voir l’encyclopédie berbère, Tome II p.208, Edisud 1985) !!!
Voici que les tunisiens et les tunisiennes deviennent des hommes et des femmes libres, de vrais imazighens et timazighines, parce que l’origine étymologique du mot amazigh veut dire simplement « l’homme libre ». Des imazighens qui viennent d’expulser de leur territoire un dictateur qui a régné sur eux en véritable colonisateur, et qui s’est enfuit vers la terre qu’il considère de ses grands-parents, l’Arabie Saoudite !!!
L’effet domino, la contagion touchera-t-elle l’Algérie, la Libye, le Maroc… vu que la société est trop divisée?
Je me rappelle que lorsque on était au moins du ramadan 2008/2958, en Kabylie, pour les préparatifs du Ve Congrès général de notre Congrès Mondial Amazigh, en compagnie de l’avocat Ahmed Adghirni et de deux autres militants, on a eu l’occasion de constater que tous les acteurs sociaux et politiques de la politique algérienne se méfiaient des uns des autres. Chacun nous confessait que l’autre était complice avec les autorités militaires algériennes. Il y régnait une profonde méfiance, désillusion et désunion… Mais au moment du référendum du président Bouteflika pour s’auto octroyer un troisième mandat, tous les amazighs de la Kabylie, que ce soient du RCD, du FFS, des Archs, de Mak… étaient unanimes : boycott de la mascarade électorale !!! Comme vous voyez, de la division naissait l’union ; et cette union vient de prendre un nouvel élan en prenant corps au sein de la « Coordination Nationale pour le Changement et la Démocratie » qui s’est engagé à sortir pour manifester le 12 février prochain afin d’expulser ce « colon arabiste qu’est Bouteflika » qui a voulu empêcher que les imazighens du monde se réunissent à Tizi Ouzou en octobre 2008/2958!
Au Maroc, même scénario. Le makhzen comme système politique traditionnel qui se cache parfaitement sous une couverture illusoire de modernité, n’a fait que perpétuer la devise romaine et coloniale française : diviser pour régner ! Et dès les premiers jours de la soi-disant indépendance du Maroc : juste après 1954/2904, le Palais manipulait les rifains pour se soulever contre l’hégémonie du parti de l’Istiqlal, et une fois révolté, le Parti de l’Istiqlal au pouvoir et le prince défunt Hassan II à l’époque n’ont pas hésité à utiliser le napalm pour réprimer ce soulèvement en 1958/ 2908- 1959/2909, après la répression sanglante de soulèvement d’Addi ou Bihi en 1957/2907 au sud est. Le pouvoir sultanien créa alors un parti makhzénien : le Mouvement Populaire, afin de récupérer les populations amazighs et contrecarrer les forces urbaine de la gauche marocaine en 1958/2908, un parti qui fût aussi objet de nombreuse divisions qui continuent jusqu’à nos jours !!! Les divisions se sont succédées au sein des partis politiques urbains et ruraux jusqu’à ce qu’on se trouve actuellement avec plus d’une trentaine de formations qui n’ont récolté qu’autour de 20% de voix lors des dernières élections législatives. Et chaque fois que surgit un mouvement politique ou social on assiste au même scénario de la division, qu’il soit de gauche, des islamistes, et bien évidemment amazigh… Une politique qui s’est accentuée dangereusement depuis la mise en oeuvre de la « bénalisation » de la vie politique marocaine, depuis qu’un certain Fouad Ali El Hima, abandonne le poste du ministre de l’intérieur pour se lancer dans la vie partisane…
Le vent de liberté, émanant de la terre de notre ancêtre préhistorien de l’Homme de Gafsa (la civilisation capsienne), nous interpelle afin de nous engager dans le vent de l’histoire.
Imazighens d’Algérie, du Maroc, de Libye et d’ailleurs, laissons de côté nos divergences, nos idéologies, nos croyances religieuses. Unissons nous, et unissons nous aussi avec nos concitoyens arabophones, désireux de la liberté et du pluralisme et de la démocratie. Mobilisons nous tous sur un même front pour exiger la transition démocratique immédiate dans nos Etats. Exigeons des réformes constitutionnelles en profondeur, afin de construire des Etats authentiquement démocratiques et de droit, qui respectent la séparation des pouvoirs, la garantie de l’indépendance de la justice, l’autonomie politique des régions autonomes, l’égalité des sexeS et l’égalité des langues officielles de l’arabe et de l’amazigh…
Le rêve est permis pour construire une fois pour toute cette Tamazgha sans frontières, une Tamazgha d’états confédérés qui respectent le partage de nos richesses naturelles et la liberté de circulation des biens et des personnes !
Vive Tamazgha libre! Vive l’Union des Etats Confédérés de l’Afrique du Nord !